Le livre et l’auteur
Guy Montag est pompier. Mais pas un pompier comme le sens commun le comprendrait. En effet, dans un monde relativement loin du nôtre, les livres font l’objet d’une censure systématique et quiconque en possède voit son bien partir en fumée par l’action de pompiers comme Montag. Montag est un pompier pyromane. Et toute sa carrière a consisté à incendier des bibliothèques, des maisons comportant des livres. Jusqu’au jour où il fait une rencontre qui fera l’effet d’un grain de sable dans un rouage à la mécanique presque parfaite…
Éditions : Folio SF numérique.
Pages : 236
Ray Bradbury, de son identité complète Raymond Douglas Bradbury est un écrivain Américain, référence du genre de l’anticipation, né dans l’Illinois en 1920 et mort en Californie en 2012. Issu d’un milieu modeste, il baignera rapidement dans l’univers des livres en fréquentant la bibliothèque de sa ville natale. Après le lycée, il décide de ne pas poursuivre des études à l’université et commencera à écrire quelques nouvelles avant de se consacrer à l’écriture à partir de la fin de l’année 1942. Il commence à se faire connaître à partir des années 1950, d’abord avec l’adaptation en bande dessinée de ses nouvelles puis après la parution de Les Pommes d’or du soleil et de Fahrenheit 451 en 1953 notamment.
Il préfère ne pas s’enfermer dans un genre particulier et navigue entre le fantastique et la science-fiction. Son œuvre et son influence font l’unanimité aussi bien durant son vivant qu’après sa disparition (Prix Ray-Bradbury, changé en Prix Nebula ; étoile sur le Hollywood Walk of Fame ; site d’atterrissage sur Mars nommé en son honneur par la NASA). (Sources : Wikipédia ; Babelio).
Mon ressenti
Une belle découverte. Une lecture passionnante. Le récit est écrit en trois parties avec une narration à la troisième personne. L’auteur fait usage de lyrisme, de métaphores qui parfois peuvent perdre le lecteur mais qui globalement s’intègrent dans une réflexion profonde sur le monde dépeint dans l’œuvre. Monde qui lorsqu’on y regarde de plus près n’est pas si loin du nôtre.
En effet, sur le fond, nous sommes dans une société Américaine, dans une « cité » sans précision, envahie par la technologie où il n’y a plus de place pour la « vraie » réflexion, pour les discussions et échanges d’opinion. Tout ce qui mobilise l’intellect, l’imagination et le sens critique de l’humain est mis au ban de la société.
L’attention du peuple est accaparée à longueur de journée par des programmes et de la musique abrutissants diffusés, pour les premiers sur des « murs-écrans » et pour la deuxième via des oreillettes dont certains auraient du mal à se passer. Seule la consommation et la poursuite d’un simulacre de bonheur, ou plutôt même je dirai une anesthésie de tout sentiment « négatif », priment. Quitte parfois à se mettre dans ses situations dangereuses (surdose de somnifères, conduite à vitesse excessive pour éprouver de l’adrénaline, etc.)
L’on ne découvre cela qu’après avoir fait la connaissance de Guy Montag, brave pompier qui fait la rencontre de Clarisse McClellan, jeune fille un peu bizarre, à la sortie d’une journée classique de travail. Sa rencontre avec Clarisse sera le point de départ d’une remise en question d’un mode de vie dont il s’accommodait jusque-là. Petit à petit, il commencera à se rendre compte des aberrations de sa société et finira par développer un malaise dans son travail. Autour de lui, sa femme Mildred ou encore son capitaine de caserne, le Capitaine Beatty percevront sa modification de comportement mais il demeurera incompris.
J’ai beaucoup apprécié le personnage de Guy Montag. Sans vous spoiler l’histoire, je l’ai trouvé plein d’audace et de bravoure même si sa situation fut stressante par moments au point de le rendre malade. Dès le départ du récit, on comprend bien qu’il sera le « vilain petit canard » (il faut bien qu’il y en ait un) mais cela est bien emmené et on assiste à l’ensemble de son cheminement vers une vision plus critique et nuancée de son environnement, au point de l’avoir en horreur. Il se questionnera sur des sujets comme la famille, l’amour ou les convictions personnelles, par exemple, chose qu’il ne faisait pas auparavant.
Parlant d’amour et de famille, j’ai au contraire beaucoup moins apprécié son épouse, Mildred. Mais je pense qu’il fallait bien là aussi qu’il y ait une personne rentrant complètement dans le moule de cette société vide et aseptisée. Quant au Capitaine Beatty, ce fut un personnage étrange. Contrairement à Montag, on sentait qu’il avait déjà goûté au « fruit défendu ». Mais donc la question se posait de savoir pourquoi il était rentré dans une fonction dont le but était de détruire des œuvres qu’il avait déjà eu à utiliser lui-même. D’autres personnes intéressantes croiseront le chemin de Montag mais je vous laisse découvrir tout cela par vous-même.
L’histoire est relativement courte et bien rythmée. Le seul bémol pour moi reste la fin que je n’ai pas complètement saisi. Cela dit, pour une première immersion dans l’univers de la dystopie littéraire/science-fiction, je dois dire que j’ai été agréablement surprise. Encore une fois, l’on pourrait penser que nous sommes loin de ce type de société mais lorsqu’on s’y penche, on voit bien comment les écrans et l’avènement des réseaux sociaux occupent aujourd’hui notre quotidien ; comment l’on tend paradoxalement vers une uniformisation de la pensée dans une société qui est de plus en plus diversifiée ; comment les gens tentent de s’échapper de leur quotidien en consommant parfois des substances pouvant nuire à leur santé, etc. La préface est d’ailleurs pertinente parce qu’elle permet de situer un peu plus le contexte de l’œuvre.
Bref, je le recommande à toute personne souhaitant découvrir la dystopie littéraire. Pour moi ce fut presque un carton plein (la fin en moins quoi). Il est disponible ici. Je vous laisse avec ce passage :
« Si vous ne voulez pas qu’un homme se rende malheureux avec la politique, n’allez pas lui casser la tête en lui proposant deux points de vue sur une question ; proposez-lui-en un seul. Mieux encore, ne lui en proposez aucun. Bourrez les gens de données incombustibles, gorgez-les de ‘’faits’’, qu’ils se sentent gavés, mais absolument ‘’brillants’’ côté information. Ils auront alors l’impression de penser, ils auront le sentiment du mouvement tout en faisant du surplace. Et ils seront heureux parce que de tels faits ne changent pas. Ne les engagez pas sur des terrains glissants comme la philosophie ou la sociologie pour relier les choses entre elles. C’est la porte ouverte à la mélancolie. » p. 100.
A bientôt pour un nouvel article.
Bisous.



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