Un Billet d’avion pour l’Afrique – Maya Angelou

Hello les amis, la forme? J’espère que oui. Nouveau mois, nouvel article!

L’histoire

Dans les années 60, partie du Caire et initialement en route pour le Libéria, Maya Angelou fait une halte au Ghana. Cette halte finira par s’étendre sur plusieurs années et deviendra un pan entier de sa vie. Tentant l’expérience d’un retour en Afrique, elle se heurtera à l’indifférence et la méfiance de ses « frères » Ghanéens qui ne voyaient en elle qu’une Noire Américaine, loin de leur ressembler en dépit de sa couleur de peau. Elle y apprendra le fanti, rencontrera le chef Ahanta (ethnie au Ghana) de l’époque ; Nana Nketsia ainsi que Malcolm X. Après quelques aventures tantôt joyeuses, tantôt douloureuses, Maya repartit pour l’Amérique en 1964, en étant convaincue qu’au fond, les Noirs Américains n’avaient jamais tout à fait quitté l’Afrique.

Avec Un Billet d’avion pour l’Afrique (All God’s children need traveling shoes en VO), Maya Angelou nous livre le 3e volet de ses mémoires, où elle essaie de se lier à une Terre dont les enfants ont été arrachés des centaines d’années plus tôt.

L’auteur et le livre

En ce qui concerne la biographie de Maya Angelou, je vous renvoie à cet article où j’en ai fait une présentation succincte avec l’essentiel à savoir.

Le livre fait 262 pages et je possède la version publié aux éditions Le Livre de Poche. Format pratique, lecture correcte, rien à redire.

Mon ressenti

A vrai dire, j’avais lu ce volet avant de lire Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage dont j’ai parlé en premier. Et c’est lui qui m’a fait tomber amoureuse de l’écriture de Maya Angelou. Donc je disais qu’il s’agissait d’un des volets de ses mémoires et en soi il peut être lu sans forcément suivre l’ordre dans lequel ils ont été publiés. C’est toujours intéressant de suivre l’évolution d’une personne tout au long de sa vie mais il ne s’agit pas d’une « saga » avec un énorme suspense à la fin ou une trame particulière qui nécessiterait de se tenir à un ordre donné. Ceci étant dit, passons à la suite.

Première chose à noter, la volonté de Maya à se faire accepter dans la société Ghanéenne. En soi, c’était plutôt logique. Pour une fois qu’elle était dans une société avec une majorité de personnes de sa couleur de peau, construite à priori sans distinction raciale, il n’y avait pas de raison pour qu’elle soit traitée différemment. Et pourtant, elle ne sera perçue par les Ghanéens (du moins en ville) que comme une Noire Américaine, comme une étrangère.

En effet, nous sommes peut-être tous Noirs (ou d’une certaine couleur de peau) mais l’environnement dans lequel nous naissons, grandissons, signe notre appartenance et il faut dire que souvent les Noirs venant d’Europe ou d’Amérique, lorsqu’ils ne sont pas complètement idéalisés par certains, font l’objet de mépris de beaucoup d’autres parce qu’étant considérés comme « déracinés ».

Puis dans le cas des Noirs Américains, il faut mentionner l’histoire des déportations et de l’esclavage qui ont réellement crée un clivage entre les individus sur les deux continents. Ces derniers pour beaucoup à une époque (et peut-être encore aujourd’hui) ne voulaient pas être associés aux Noirs Africains, qu’ils considéraient comme « sauvages » ou qui leur ont été présentés dans l’histoire comme étant des traitres à la base de la vente de leurs ancêtres. D’autres par contre recherchaient « activement » un lien comme c’était le cas de Maya qui à son arrivée, espérait être accueillie par des égards particuliers, au vu de leur histoire douloureuse – ils seraient vu comme des survivants. Mais la population locale n’en avait que faire de ce pan de l’histoire et la voyait comme une Américaine, point.

En tant qu’Américaine, elle ne pouvait s’empêcher de faire des comparaisons entre ceux qui étaient restés sur le continent et les descendants des déportés. De pointer les différences de comportement. Les uns avaient conservé une sorte « d’innocence », se sentaient bien dans leurs baskets dans leur pays et n’étaient pas « impressionnés » par les étrangers. Tandis que les autres devaient constamment prouver leur légitimité dans la société dans laquelle ils vivaient.

Ce besoin de rattachement à un peuple, finit par être comblé lorsque Maya quitta Accra pour découvrir les autres villes du Ghana, notamment à Dunkwa puis à Keta. A Dunkwa, il avait suffi d’un coup d’œil pour que son hôte lui dise qu’elle était sûrement une Bambara du Libéria (j’ai trouvé cela plutôt surprenant comme coïncidence vu qu’au départ, Maya cherchait à se rendre au Libéria, haha). Puis à Keta, elle fut prise pour une autre par les femmes du marché, qui voyaient en son visage, une tête probablement disparue depuis l’époque de l’esclavage. Ainsi pour Maya, tout cela était bien le signe que nous étions un seul et même peuple, que malgré toute la souffrance du passé, les différences de langue, les différences de culture construites au fil des années, nous restons forts et avons su lutter contre vents et marées pour rester debout.

Ensuite, deuxième chose, il s’agira de la brève relation amoureuse que nouera Maya avec Sheikhali un Malien. Ce dernier voulait faire d’elle sa femme alors qu’il en avait déjà une. Il lui disait qu’elle était une femme bonne mais qu’au Mali, les femmes lui apprendraient à être encore meilleure. Que grâce à lui, on la respecterait. Mais avant tout, cela elle devait renoncer à son « impatience de femme blanche » p.122. Naturellement celle-ci refusa et se fit traiter de femme bonne mais dépourvue d’intelligence. No comment. Je ne suis ni pour la polygamie, ni pour les hommes qui pensent comme ce Sheikhali. Qu’il aille s’occuper de son foyer et de ses enfants, tchip.

Enfin, il est à noter la modification de sa relation avec son fils. Celui-ci devenait adulte mais pour elle qui a toujours vécu avec lui, se voir ainsi délaissée fut douloureux. Je ne suis pas mère (pas encore) mais je n’ose pas imaginer ce que cela doit être que de voir vos enfants s’éloigner de vous du jour au lendemain. L’on se sent perdre pied, surtout pour une mère célibataire. Les enfants pour certaines personnes sont leur seule ressource. Mais je me dis aussi que dès qu’on en fait, il faut se préparer mentalement à les voir partir un jour. Cela ne sera pas forcément le cas (enfin ils quitteront la maison familiale mais peut-être pas la ville) mais vaut mieux s’y préparer.

Ce ne fut pas la totalité des aventures de Maya. Elle rencontra entre autres Malcolm X, qui me marqua avec son explication de pourquoi il se qualifiait de Noir alors qu’il ressemblait à un Blanc. En effet c’est dans la communauté Noire qu’il a été le plus accepté, le plus perçu comme un « frère » et non comme un « nègre ». Petit aparté sur le ressenti de Malcom X, cela pour moi a fait écho aux problèmes identitaires que peuvent rencontrer les métisses. Du moins les métissés Blanc/Noir. Certains comme Malcom X s’identifient plutôt comme étant Noirs, mais d’autres non. Et parfois certains ne savent même pas où se mettre parce que des deux côtés, on essaie de les mettre dans des cases (chez les Blancs, on leur dit qu’ils sont Noirs et chez les Noirs, on leur dit qu’ils sont Blancs).

J’avoue que personnellement, j’ai toujours perçu les métisses Blanc/Noir comme des Noirs plus qu’autre chose, sans réelle explication. Mais en y songeant, on se rend compte que c’est comme oblitérer une partie de leur identité. Après cette histoire d’identité dépend aussi de l’environnement dans lequel ils ont grandi, de l’éducation qu’ils ont reçu. Certains auront plus de contact avec un côté de leur identité que l’autre. Et d’autres auront la chance de bénéficier d’une éducation bi-culturelle. Finalement, tout ce que moi je dirai c’est qu’ils sont libres de se définir comme ils veulent en fonction de leur vécu, de leur ressenti et la société ne devrait pas leur imposer une case bien définie.

Revenons à Maya maintenant. Elle sera activiste, professeur à l’université de Legon, se prendra d’affection pour sa coiffeuse Efua, qui mourra dans des circonstances bizarres et deviendra la « tante » (marque de respect) d’un jeune garçon qui lui proposera des services à domicile juste parce qu’il l’aimait bien.

Bref, Maya Angelou vécut plusieurs « vies » durant ce court séjour au Ghana et sut dans sa façon d’écrire nous transmettre ses peurs, ses doutes, ses joies. Avec Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage, ce livre est sa deuxième œuvre que je lis. Et je pense que je n’en ai pas fini, d’autant plus qu’il me reste les autres parties de ses mémoires à découvrir. Je vous le recommande donc à 100% 🙂

Le livre est disponible ici et je vous retrouve bientôt pour un nouvel article. Comme d’habitude, prenez soin de vous et à bientôt.

Bisous.

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2 réponses à « Un Billet d’avion pour l’Afrique – Maya Angelou »

  1. J’ai tant aimé ta réflexion sur les métis et leur dilemme ! Très bon article. Je continue à te suivre assidûment. 😉

    Aimé par 1 personne

    1. Merci beaucoup pour ton assiduité Folowa! 😉 contente que tu trouves régulièrement ton bonheur sur mon blog 💕

      Aimé par 1 personne

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A PROPOS

La lecture m’accompagne au quotidien depuis quasiment mon enfance. Passionnée par les auteurs Africains, Afro-descendants et des minorités en général, je ne m’empêche pas d’explorer d’autres horizons lorsque j’en ai envie ou lorsqu’on me le propose. Depuis plus de 5 ans, je partage mon ressenti et mes avis aussi bien par ici que sur Instagram, Facebook et Twitter. Bienvenue, j’espère que la visite vous plaira et n’hésitez pas à me suivre sur mes réseaux sociaux pour plus d’échanges autour des livres. Annette.

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