Filles de la mer – Mary Lynn Bracht

Le livre et l’auteur

Nous sommes en pleine seconde guerre mondiale. L’occupation japonaise en Corée fait rage. Sur l’île de Jeju, au sud de la Corée, vivent des femmes indépendantes, plongeuses en mer pour subvenir aux besoins de leur famille. Il s’agit des Haenyeo. Celles-ci transmettent leur art de mère en fille. Hana et Emi sont filles d’haenyeo. Alors qu’Hana vient à peine de passer dans le cercle fermé de ces femmes, elle essaiera de protéger sa jeune sœur d’un soldat japonais et se fera enlever à sa place. Commence alors pour elle un long voyage jusqu’en Mandchourie où elle servira de « femme de réconfort ». Emi quant à elle, restée sur Jeju ne connaitra pas non plus une vie rose… Plusieurs années plus tard, le passé refait surface et Emi doit s’y plonger pour trouver sa rédemption.

Editions : Pocket

Pages : 416

Mary Lynn Bracht est une Américaine d’origine Sud-coréenne ayant passé son enfance et sa jeunesse au Texas au sein d’une large communauté de femmes sud-coréennes. C’est à leur contact qu’elle a appris les épreuves que sa mère ainsi que d’autres milliers de femmes ont enduré en grandissant dans la Corée d’après-guerre.

Elle est titulaire d’un Master en écriture créative au Birbeck College à Londres (2015), ville où elle réside depuis plus de dix ans.

Filles de la mer est son premier roman paru à Robert Laffont en 2018. (Sources : Wikipédia et Babelio).

Mon ressenti

Pour un premier roman, c’est un sacré roman ! La plume est incisive, l’histoire vous prend aux tripes et il est quasi impossible de le relâcher avant d’avoir tourné la dernière page. Le récit commence avec l’initiation d’Hana en tant qu’haenyeo. Puis très vite, survient son enlèvement par un soldat japonais alors qu’elle tente de protéger Emi.

Comme ce qui se fait souvent dans les romans historiques, l’auteur mêle passé et présent pour raconter les vécus d’Hana et d’Emi. Pour les personnes comme moi, fan des romans historiques et habituées à lire des œuvres écrites dans ce style, la lecture se fait aisément et l’on ne se perd pas entre les époques. Le nombre de personnages impliqués est assez limité, ce qui à mon avis facilite également la navigation entre le passé et le présent.

Hana est une jeune femme plus que brave. Son combat pour la liberté est aussi beau que douloureux. La suivre dans son périple m’a plusieurs fois été difficile tant les faits dépeints étaient horribles. Son vécu fait écho à celui des cinquante à deux cent mille autres femmes coréennes qui ont été kidnappées, piégées ou vendues comme esclaves sexuelles pour et par l’armée Japonaise en temps de guerre. Très peu de ces femmes ont pu retrouver le chemin de leurs foyers. Une grande partie de ces femmes a perdu la vie en route ou dans les conditions de vie horribles que l’on peut imaginer au sein d’une maison close sur des terres quasi inoccupées. Ce n’est que plusieurs années après la fin de la guerre que l’une des survivantes de ces « femmes de réconfort » osera prendre la parole pour révéler au grand jour leur histoire.

S’en est suivie la mise en place dans les années 90 de ce qu’on appelle aujourd’hui la « Manifestation du mercredi » où chaque mercredi à midi, plusieurs femmes (et hommes) se regroupent devant l’ambassade du Japon à Séoul pour demander la restauration de la dignité et des droits de l’Homme des « femmes de réconfort » ainsi qu’une reconnaissance des faits passés comme un crime de guerre. En 2011, à l’occasion de la 1000e manifestation du mercredi, sera construite en face de l’ambassade du Japon à Séoul, une « statue de la Paix », en mémoire des victimes de l’esclavage sexuel perpétré par l’armée Japonaise en temps de guerre. Et encore, les autorités chercheront à tasser les choses pour ne pas salir leur image…

Il est malheureusement courant que des femmes subissent des violences (notamment sexuelles) en temps de guerre. Cela a été valable en Corée mais c’est toujours le cas actuellement dans les régions en Conflit comme en République Démocratique du Congo, en Afghanistan, en Syrie, etc. Il est donc nécessaire de ne pas fermer les yeux sur ces agissements afin de demander réparation pour ces femmes, ces familles détruites par la guerre.

Emi n’aura pas été épargnée par la guerre non plus. Bien que son destin fût moins « tragique » que celui de sa sœur, elle connaîtra son lot de peines, marquées par la culpabilité, qu’elle enfouira au fond de son être avant de finalement accepter d’y faire face pour trouver la paix. Sa détermination à retrouver les traces d’Hana lui causera bien des peines mais elle n’arrêtera pas tant qu’elle n’aura atteint son but.

En dehors de cette ambiance majoritairement difficile du récit, ce roman dégage quand même un message d’espoir et de résilience. Par ailleurs, on y apprend aussi le métier des haenyeo que j’ai découvert pour ma part. Il s’agit de femmes, parfois âgées de plusieurs années, procédant à un type de pêche assez particulier. En effet, tout leur art réside dans le fait de plonger à des mètres de profondeur (environ 10), en apnée, sans masque à oxygène pour aller pêcher des fruits de mer (ormeaux, oursins) pour nourrir leurs familles. Elles s’y mettent très tôt le matin et passent leur vie en mer. Elles sont donc exposées aux dégâts du sel et du soleil en mer. Mais cela ne les empêche de continuer leur travail jusque tard dans leur vie. Selon le site de l’UNESCO, elles ont été inscrites sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité (#GirlPower#WonderWomen).

En somme, ce livre fut une belle découverte, touchante et j’ai hâte de lire les prochaines œuvres de Mary Lynn Bracht. De plus, sur les dernières pages, elle nous fait un historique de la Corée avec quelques éléments que j’ai repris dans cet article. Je ne peux que vous le recommander. Vous ressentirez de la révolte, de la tristesse mais aussi de l’espoir et de la joie. Sortez les mouchoirs pour les plus sensibles. Le livre est disponible ici.

Quant à moi, je vous dis à bientôt pour un nouvel article. Prenez soin de vous.

Bisous.

Pour en savoir plus sur les haenyeo, c’est par ici :

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