L’immeuble Yacoubian – Alaa El Aswany

Le livre et l’auteur

Edifié dans les années 30 sur demande d’un riche aristocrate Arménien, l’immeuble Yacoubian dont il porte le nom se dresse fièrement dans le centre du Caire, au meilleur emplacement de la Rue Soliman-Pacha. Initialement destiné aux hautes classes sociales, il deviendra progressivement tout d’abord un lieu d’habitation des militaires puis du « bas » peuple à la suite des événements politiques qui secoueront l’Égypte dès les années 50. A l’ère moderne, il regroupe entre ses murs encore quelques personnes riches mais aussi une population variée où l’on retrouve des jeunes à la recherche de leur place dans une société corrompue, des affairistes louches ou encore des journalistes à la vie sentimentale tumultueuse. Avec ce roman, Alaa El Aswany dépeint une société Égyptienne haute en couleurs où se côtoient corruption politique, inégalités sociales et montée de l’Islamisme.

Éditions : Actes Sud

Pages : 331

Alaa El Aswany ou plus précisément Alaa al-Aswany est un écrivain Égyptien né au Caire en mai 1957. Issu d’une famille d’intellectuels, il fera ses études secondaires dans un lycée de langue Française avant de partir pour l’Université de l’Illinois à Chicago où il étudiera la chirurgie dentaire. Très vite, il s’engagera dans la lutte contre la corruption dans le monde politique notamment à travers ses écrits et son dernier roman J’ai couru vers le Nil, traduit en Français en 2018, où il fait revivre les héros de la révolution de 2011, place Tahrir au Caire, sera interdit en Égypte.

L’immeuble Yacoubian, son premier roman, paru en 2002 a connu un très grand succès avec une traduction en une vingtaine de langues et des adaptations cinématographies et télévisuelles. (Sources : Wikipédia et Babelio).

Mon ressenti

Un super moment de lecture. C’est comme cela que je résumerais mon avis sur L’Immeuble Yacoubian. C’est le genre de livre que l’on n’a pas envie de poser tant que l’on n’a pas saisi le fin mot de l’histoire.

Avant d’en dire plus sur le contenu, il faut savoir que le récit est écrit de façon à suivre plusieurs personnes et leur parcours à la fois. La plume de Alaa El Aswany se déroule sans accrocs et l’on ne se perd pas entre les diverses histoires. Ainsi, on fait la connaissance et suit : Taha, le fils du concierge de l’Immeuble Yacoubian qui souhaite devenir policier et Boussaïna sa jeune copine qui doit déjà porter sur ses épaules la responsabilité de supporter sa famille en trouvant un travail ; Zaki Dessouki, plus connu sous le nom de Zaki Bey, vieil aristocrate, au goût un peu trop prononcé pour la gent féminine et qui vit dans un monde bien à lui, comme coupé de la réalité ; Hatem, le journaliste super rigoureux, au travail irréprochable, comme s’il cherchait à couvrir le fait qu’il était homosexuel dans un société encore un peu intolérante sur les bords et enfin Azzam, un homme d’affaires riche mais louche qui cherche à se faire élire comme député.

Cela fait beaucoup de monde à suivre mais chaque histoire a sa particularité et nous montre une facette de la société Egyptienne moderne. Nous retrouvons la notion de corruption et de pouvoir à travers les personnages de Taha et Azzam, le premier en est victime tandis que l’autre y a recours allègrement. La question des mœurs se pose avec Zaki Bey, Hatem et Boussaïna ; le premier qui malgré un certain âge continue presque à courir les jeunes femmes dans les rues sans chercher à sa poser, le second entretenant une relation avec un immigré Soudanais marié qui plus est, et enfin la dernière qui devra faire le choix entre conserver son éducation, sa dignité et son intégrité ou accepter certaines conditions si elle souhaite pouvoir se trouver un travail suffisamment rémunérateur. Et enfin, l’on verra de nouveau avec Taha comment l’on peut passer du « gentil » jeune homme pieux, ouvert d’esprit à un « extrémiste Islamiste » dans une société où vous être traités comme des moins que rien par des « mécréants », placés à des postes stratégiques, qui eux n’en ont rien à carrer d’Allah.

Par ailleurs, l’on a une idée de la place de la femme (encore une fois) dans une société majoritairement Musulmane et dominée par les hommes. Comme souvent, celle-ci est vue comme devant être soumise et ayant peu le droit à la parole, avec parfois l’inconvénient de voir sa vie décidée pour elle. De plus, en dehors de toute considération religieuse, le patriarcat environnant laisse penser aux hommes qu’ils peuvent disposer des corps des femmes comme bon leur semble, surtout lorsque celles-ci sont démunies. Et une fois qu’ils ont profité de la situation, ce sont à nouveau ces pauvres jeunes femmes qui récoltent tous les blâmes pour avoir subi une situation qu’elles n’ont absolument pas engendré.

Enfin, détail intéressant et à mon avis souhaité de la part de l’auteur, c’est l’hypocrisie dont peuvent faire preuve certaines personnes en apparence plus pieuses que le Prophète lui-même. Les adeptes de la corruption qui espèrent voir leurs affaires marcher au nom d’Allah, les parents qui savent que leurs enfants trempent dans des affaires louches – parfois contre leur gré – pour subvenir à leurs besoins mais qui continuent à les encourager dans cette voie à coups de « qu’Allah te bénisse », accepter ou rejeter une personne en fonction de son orientation sexuelle mais continuer à solliciter la grâce d’Allah, etc. Tous ces éléments montrent bien que malgré l’étiquette conservatrice que l’on peut apposer aux Pays majoritairement musulmans, leurs habitants demeurent des humains tout comme ceux des autres pays avec leurs qualités, leurs défauts et surtout leurs vices.

En somme, je recommande. Un récit mêlant plusieurs parcours avec un ton tantôt léger, tantôt dramatique, mais toujours adapté à l’histoire qui vous est racontée. Le livre est disponible ici.

A bientôt pour un nouvel article. D’ici là, prenez soin de vous.

Bisous.

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